ActualitésA l'écoute du brame Dans nos Vosges, à la fin de l’été, la forêt et ses arbres se transforment, les premières feuilles jaunissantes se détachent ; les matins brumeux et humides, les soirées plus fraiches annoncent l’arrivée du brame. Septembre arrive, les cerfs mâles affichent leur condition physique optimale, les adultes arborent leur majestueuse ramure dont la pousse s’est terminée courant juillet. Ils évoluent dans leur splendeur et sont prêts pour le meilleur et pour le pire. Le brame est la période au cours de laquelle cerfs et biches se réunissent pour s’accoupler en vue de se reproduire pour perpétuer l’espèce. L’objectif inné pour les cervidés consiste uniquement à maintenir ou à agrandir les hardes. Mais le sens du mot « brame » correspond également aux cris (appelé aussi « raires ») émis par les cerfs mâles pour impressionner les concurrents et attirer l’attention des femelles. Le brame SONORE se caractérise par des meuglements divers, parfois impressionnants, surtout la nuit, traduisant des désirs, de l’agressivité, et même de la fatigue. Un observateur expérimenté, par la seule écoute, peut déterminer une situation précise relative à un groupe d’animaux. Les sujets âgés et les grands adultes, de par leur corpulence, possèdent une voix grave à résonnance caverneuse, ample et rugueuse. Les vieux sont discrets et peu loquaces, à l’inverse des jeunes, excités, bavards et dotés de voix aigues. La qualité des cris traduit une situation :
Ainsi les mâles peuvent se juger mutuellement. La période du rut s’étale du 1er septembre au 1er octobre environ, avec un léger décalage entre la montagne et la plaine plus précoce. Le pic dure d’une semaine à environ 10 jours, entre le 15 et le 25 septembre. Certaines conditions climatiques comme le froid ou l’humidité peuvent accélérer ou intensifier le processus. Après ce pic, l’activité diminue progressivement pour s’éteindre un peu avant la mi-octobre. Le brame se localise toujours de la même manière : Pour la majorité des cas, les secteurs privilégiés du brame se situent dans le noyau, c’est-à-dire dans la zone où vit la majorité de la population des biches et des faons, là où se produisent les mises-bas au printemps (la pouponnière) et où les jeunes vont se lier au territoire. C’est ce qu’on appelle l’empreinte locale. Fin août, certains cerfs sont déjà présents et discrets dans les secteurs de brame, à proximité des biches. D’autres, appelés cerfs « pèlerins », venant de plus loin, s’acheminent encore vers les lieux tant désirés où ils pourront participer aux ébats. Pour la plupart, les places de rut correspondent à de la futaie claire, à des pâturages ou à des clairières enclavées dans la forêt, synonymes d’espace et de nourriture indispensable aux biches et aux jeunes. Cette place de brame se situe sur des zones de bonne visibilité, où le vent tourne, afin de laisser toute possibilité au cerf dominant de détecter par la vue ou par l’odorat la présence d’un concurrent ou d’un humain pouvant être éventés jusqu’à une distance de 300 mètres. Les vieux cerfs, plus méfiants, ou d’autres dérangés par la présence humaine, évolueront plutôt dans des milieux couverts et fermés. Le déroulement du brame est classique : Dès le début, les cerfs se rapprochent des biches, et les dominants s’organisent pour trouver la meilleure place. Sur ce secteur, le plus fort, le plus expérimenté, le « grand seigneur » fait la loi, rassemble un maximum de biches en pré-chaleurs, les surveille et se les accapare. Plus son raire est puissant, plus il a de chances d’éloigner ses rivaux. Ainsi, du crépuscule à l’aube, le cerf de place, accompagné de sa harde de biches et de faons, quitte son abri pour rejoindre la zone de gagnage, fréquemment une clairière appelée place de brame, choisie par les biches et souvent identique d’une année à l’autre. Les cerfs satellites (jeunes, subadultes ou autres adultes sans biche) s’approchent de la harde pour tenter d’en extraire une femelle ; s’ensuit alors un combat entre cerfs de taille voisine, afin de récupérer la « belle » conquise par le concurrent. Le vainqueur sera le dominant, futur géniteur. Les rivaux, vaincus, n’ont plus qu’à attendre la venue d’une éventuelle biche seule, à la fois libre et en phase d’ovulation. Une biche est fécondable environ 5 à 8 heures par an, période appelée œstrus, durant laquelle le cerf dominant ne la quitte plus, au détriment des autres femelles, alors convoitées par les concurrents opportunistes. Lorsqu’une nouvelle biche devient fécondable, le dominant s’en occupe à son tour, afin de la saillir, parfois après un autre combat. Les biches sont fécondables jusqu’à leur mort naturelle, se situant autour de 15-17 ans, en sautant parfois une année. Un cerf peut effectuer 5 à 6 saillies par jour, s’épuiser en bramant et en combattant les rivaux. Cette « cadence infernale » pendant trois semaines, induit chez un tel individu une dépense d’énergie énorme, pouvant entraîner une perte de poids d’environ 20%, d’autant plus qu’il ne se nourrit pas pendant le brame. Durant cette période, les cerfs mâles dégagent une odeur forte musquée, secrétée par des glandes à parfum et également par son pelage tout imprégné de sueur et de sperme. Après cette phrase d’apogée, le rut régresse progressivement en intensité et en durée. Les cerfs, affaiblis, amaigris, se calment et se reposent avant de rejoindre leurs territoires habituels, en périphérie, loin des biches. Cette fin de brame se produit durant la première quinzaine d’octobre, avec quelques variantes selon les secteurs. Seuls quelques jeunes cerfs resteront encore dans le noyau avec les biches et leurs faons. Il existe des brames tardifs, discrets, lorsqu’une femelle n’a pas été saillie pendant l’œstrus, et dans ce cas, un nouvel œstrus se produira au cours du cycle d’ovulation suivant, environ trois semaines plus tard, avec les mêmes effets atténués par une faible présence de mâles. Il peut en être de même avec certaines bichettes, n’arrivant à maturité sexuelle qu’à environ 18 mois, en novembre, voire décembre. Quant aux biches, les voilà désormais en gestation et en lactation jusqu’en février, puis uniquement en gestation jusqu’en juin (époque des naissances) et en lactation jusqu’au brame suivant. Elles fournissent sans cesse un travail considérable, et méritent le plus grand respect de tous, et particulièrement des chasseurs. Toutes ces scènes magnifiques méritent d’être protégées et des contrôles seront réalisés par les agents assermentés. Jean-Pierre BRIOT : Vice-Président Montagne FDC 88 et Président Commission Grand Gibier FDC 88 RECOMMANDATIONS AUX CHASSEURS La chasse du cerf au brame est un grand privilège et sa pratique ne peut se justifier que par une bonne connaissance de l’espèce et par une éthique rigoureuse en conformité avec une gestion rationnelle de l’espèce.
HALTE AU DERANGEMENT PAR LE GRAND PUBLIC Les causes du dérangement des cervidés pendant le brame sont nombreuses et très néfastes:
« Il est indispensable de respecter les animaux, ils vous le rendront bien et continueront à bramer » Retour vers toutes les actualités ! |